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Amorcée en 2019, la relance de la consommation ne signifie pas forcément plus de croissance

- Les Echos, 28 janvier 2020

28/01/2020

Si les dépenses de consommation non contraintes sont bien reparties à la hausse en France en 2019, notamment grâce aux mesures en faveur du pouvoir d'achat, la croissance du PIB n'accélère pas. Tout d'abord parce que la part importée de ces dépenses, consistant notamment en produits manufacturés, est relativement élevée. Ensuite, parce que l'investissement public et celui des entreprises devraient ralentir alors qu'ils étaient les principaux soutiens de la croissance depuis trois ans.

Consommation des ménages  en biens durables

• En 2019, la relance de la consommation semble a priori modeste au regard de la progression du pouvoir d'achat

Fin janvier, l'Insee délivrera sa première estimation de la croissance en France en 2019. Sauf surprise, elle sera probablement de 1,3%. Les dépenses de consommation des ménages, qui représentent 54% du PIB, devraient afficher une progression comparable.

En 2019, la relance de la croissance par la consommation aura donc été modeste malgré une progression du pouvoir d'achat du revenu des ménages nettement supérieure à celle du PIB (2,1 contre 1,3%) à la faveur à la fois de l'accélération de l'emploi marchand (+1,5%) et des mesures fiscales et budgétaires adoptées fin 2018 en réponse au mouvement des "gilets jaunes".

De prime abord, les effets de la relance ne sont pas montés en puissance en fin d'année. La progression de la consommation des ménages serait de 0,1 à 0,3% au 4e trimestre. La raison principale de ce probable nouveau rendez-vous manqué est de nature climatique, au sens météorologique et social.

Tout d'abord, en raison des températures très douces en fin d'année, les dépenses de produits énergétiques seront probablement en recul par rapport au précédent. Ensuite, le mouvement de grève de décembre se traduira par un probable recul des achats de services de transport ainsi que cela avait été le cas au printemps 2018 (-3,2%) marqué par une grève "perlée".

• Mais la relance de la consommation "compressible" (hors alimentation, énergie, loyer, etc.)
a bien eu lieu

L'essentiel n'est toutefois pas là. La stimulation du pouvoir d'achat semble en fait bel et bien produire les effets attendus en matière d'accélération de la dépense des ménages. L'Insee a montré dans sa note de conjoncture, parue en juin dernier, que les fonctions de consommation ont des réactions très différentes à un choc de revenu.

Les dépenses dites pré-engagées (loyers, assurances, télécommunications…) et celles peu compressibles (alimentation, santé…) réagissent peu à un tel choc, qu'il soit positif ou négatif, contrairement aux dépenses compressibles (habillement, mobilier, loisirs…).

En somme, pour rechercher la trace d'une relance, ce n'est pas la consommation agrégée qu'il faut examiner mais la consommation dite "compressible". Une manière de l'approcher est d'apprécier l'évolution des achats de biens durables. Or, ceux-ci connaissent depuis quelques mois une accélération marquée. Sur les six derniers mois, ils sont en hausse de 2,5%.

• En France, davantage de dépenses en produits manufacturés
signifie plus d'importations

Plus de consommation "compressible" n'est cependant pas synonyme d'une croissance globale plus forte. Pour deux raisons principalement. La première tient à l'évolution des importations. La part importée des dépenses "compressibles", qui consistent notamment en produits manufacturés, est bien plus élevée que celle des dépenses "peu compressibles" et "pré-engagées". Il y a fort à parier qu'un peu plus de consommation compressible se traduit aussi par une accélération des importations. Ces dernières entrant en déduction dans le calcul du PIB, elles viennent peser sur la croissance.

La seconde tient à l'évolution du contexte. Depuis trois ans, la croissance a principalement reposé sur les dépenses d'investissement, qu'elles soient le fait des ménages, des entreprises ou des administrations publiques. Or, 2020 est une année d'élections municipales qui, par le passé, ont quasi systématiquement été marquées par un fort ralentissement de l'investissement public. Ce sera très probablement à nouveau le cas en 2020, voire dès le dernier trimestre 2019. Les entreprises, ensuite, manifestent déjà une prudence accrue quant à leurs projets d'investissement. Les industriels, par exemple, anticipent une stagnation de leurs dépenses d'investissement en valeur l'an prochain.

En somme, la relance de la consommation est bien présente, elle devrait accélérer en 2020, mais elle ne suffit pas forcément à obtenir plus de croissance.

Chronique de Denis Ferrand

à retrouver en ligne sur le site Les Echos, Le Cercle

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