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Documents de Travail (couverture)

Documents de travail

Des rapports publics pour le débat de politique économique

En accès libre, les documents de travail présentent des analyses issues de travaux approfondis, principalement sur des questions de politique économique touchant l'appareil productif.

Voir aussi :

- Repères, des notes visant à nourrir le débat sur la politique économique et la transition écologique.

- A Noter, des analyses succinctes sur un chiffre ou une question économique.

Par thème :

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La fiscalité locale de production, un facteur d'écart de compétitivité entre la France et les autres pays européens

- N.87, septembre 2023

19/09/2023

Olivier REDOULES
Jade FAUDEMER

Les prélèvements nets sur les entreprises sont plus élevés en France que dans les autres grands pays européens, la fiscalité locale de production y contribuant largement. L'état des lieux actualisé de ces impôts montre un différentiel persistant de compétitivité en défaveur de la France, malgré les importantes baisses intervenues depuis 2021. Après la suppression de la CVAE annoncée pour 2027, la France devrait se situer à mi-chemin entre l’Espagne et l’Italie, mais loin devant l’Allemagne et les Pays-Bas, sous réserve de l’évolution des autres postes de la fiscalité locale.

France et grands pays d'Europe - Poids des impôts de production en % de la valeur ajoutée des entreprises en 2019  (graphique Rexecode)

La baisse des impôts de production dans le cadre du plan de relance, en 2021, puis la baisse de la CVAE en 2023 et sa suppression annoncée d’ici 2027 (si elle va à son terme), devraient réduire les prélèvements sur les entreprises d’environ 18,6 Md€ (estimation sur la base des montants de 2019, avant retour d’impôt sur les sociétés). A terme, la baisse des impôts de production représenterait, ex ante, environ 1,4 point de valeur ajoutée sur l’ensemble des entreprises (sociétés non financières et financières).

Pour autant, il resterait un écart en défaveur des entreprises françaises. L'écart de prélèvements sur l’ensemble des sociétés non financières et financières avec l’Allemagne serait proche de 8 points de valeur ajoutée (environ 100 Md€), dont 4 points en fiscalité de production, la fiscalité locale de production comptant pour 1 point.

Une imposition locale de production sur les entreprises plus importante en France que chez ses voisins européens

• Les prélèvements sur les entreprises sont plus élevés en France que dans les autres grands pays européens. Une fois déduites les subventions de production et les aides à l’investissement, les prélèvements nets atteignaient 23% de leur valeur ajoutée en 2019 en France (21% après les baisses d’impôts intervenues depuis et la suppression annoncée de la CVAE) contre 20% en Italie, 17% en Espagne, et 14% en Allemagne.

• Les impôts de production expliquent une part importante de l’écart de prélèvements sur les entreprises avec les autres pays européens.

• La France se distingue aussi par une fiscalité locale de production plus importante, en proportion de son PIB. Après la suppression de la CVAE annoncée pour 2027, la France devrait se situer à mi-chemin entre l’Espagne et l’Italie, mais loin devant l’Allemagne et les Pays-Bas, et sous réserve de l’évolution des autres postes de la fiscalité locale (notamment la taxe foncière, appelée à augmenter en France dès 2023).

Depuis 2021, des baisses d’impôts locaux de production sur les entreprises importantes, plutôt favorables à l’industrie et aux ETI

En cohérence avec les objectifs affichés de compétitivité et d’attractivité industrielles, les baisses d’impôts de production portent davantage :

• sur l’industrie manufacturière, qui bénéficie de près d’un tiers des baisses d’impôts du plan de relance, soit environ trois fois sa part dans le PIB en valeur ;

• sur les entreprises de taille intermédiaire (ETI), d’industrie ou de services, qui reçoivent 40% des baisses d’impôts du plan de relance, alors qu’elles représentent 25% de la valeur ajoutée des entreprises en France.

Ce ciblage sur l’industrie et les ETI est cohérent avec les signaux positifs perceptibles en termes d’investissement et d’emploi industriels ainsi que d’implantations d’usine, dans un contexte plus global de politique de l’offre.

Des recettes préservées pour les collectivités locales, mais un amoindrissement du lien avec les entreprises doublé d’une perte d’autonomie fiscale

Les collectivités territoriales sont globalement bénéficiaires de ces réformes sur le plan strictement financier. En effet, le législateur a compensé les pertes de recettes qui découlent des baisses de CVAE, CFE, TFPB, qui sont des impôts locaux, en leur substituant de nouvelles recettes dynamiques. En revanche, le lien financier entre les collectivités territoriales et les entreprises s’est quelque peu amoindri. En particulier l’incitation budgétaire pour les collectivités à accueillir des sites industriels est affaiblie.

Dans un contexte de besoins importants d ’investissement dans la transition écologique et d’objectif de souveraineté industrielle, il est important de poursuivre la baisse des impôts de production, à commencer par la suppression de la CVAE, annoncée d’ici 2027. Par ailleurs, les modalités de répartition des recettes des collectivités territoriales doivent les inciter davantage au développement économique, et notamment industriel, de leur territoire.

 

Compétitivité, industrie, finances publiques: les enjeux macroéconomiques de la régulation économique du médicament en France

- N.86, Juillet 2023

04/07/2023

Olivier REDOULES Gilles KOLEDA

La France est confrontée à deux problèmes majeurs en matière d’économie du médicament et de santé publique: un accès aux médicaments plus contraint et une attractivité industrielle moins favorable. Si l’industrie pharmaceutique française reste un atout en matière d’exportations, d'innovation et d’emploi industriel qualifié, elle est en perte de vitesse par rapport à ses concurrents européens. La régulation économique du médicament a certes permis d'en baisser le coût pour les patients et plus encore pour les comptes publics, mais elle a contraint les marges et les investissements du secteur, pénalisant la production en France. Moins attractif, le marché français est plus exposé à des pénuries d'approvisionnement, potentiellement coûteuses sur le plan sanitaire et économique.

Industrie pharmaceutique : prix de la valeur ajoutée France, Allemagne, Italie (grahique Rexecode)

Au cours des deux dernières décennies, la régulation économique du médicament a réussi à faire baisser le prix des médicaments au profit des patients et des comptes de l'assurance maladie en France. Le prix moyen appliqué aux patients, c’est-à-dire le prix après remboursement par l'assurance maladie mais avant celui des complémentaires santé a baissé, tandis que le volume fourni augmentait et que l’enveloppe budgétaire globale à la charge de l’assurance maladie diminuait.

Mais la France s'est aussi distinguée par une baisse des prix à la production des industriels et des prix à l’importation singulière en Europe. La régulation économique du médicament a eu en réalité un double impact depuis le début des années 2000: d’une part une orientation à la baisse du prix brut des médicaments versé aux producteur, et d’autre part, une baisse de la prise en charge par les pouvoirs publics, de sorte que le prix net pour les ménages a beaucoup moins baissé que le prix brut.

Pour les industriels du médicament, une baisse du prix de la valeur ajoutée signifie une diminution de la capacité à rémunérer les salariés ou à dégager des marges, notamment pour investir. Or cette aptitude s’est bien plus rapidement et fortement érodée dans le cas de la production en France que chez ses grands voisins européens, notamment l’Allemagne et l’Italie, qui n'ont pas connu cette baisse des prix.

La régulation économique du médicament française semble toucher à ses limites
dans un contexte international très concurrentiel

Elle est confrontée aux effets de la fragmentation des chaînes mondiales de production et d’une concurrence croissante entre pays pour attirer des sites de production, avec la recherche d’un retour fiscal et industriel local sur les dépenses de santé par les gouvernements.

La France voit son accès aux médicaments devenir plus contraint, qu'ils soient de base ou innovants, ce qui soulève une problématique de santé publique. Son attractivité industrielle pour la production de médicaments est affaiblie. Par ailleurs, la transition écologique génère des surcoûts dans la production et la distribution pharmaceutique qui constituent des contraintes supplémentaires.

Les niveaux de prix des médicaments versés aux producteurs doivent mieux refléter ces enjeux et contraintes, en ajustant si nécessaire le reste à charge, le volume des médicaments remboursés ou l’enveloppe budgétaire. A cet égard, il est possible de mieux capitaliser les bénéfices de l’innovation médicamenteuse lorsque qu’elle génère des économies structurelles dans le système de santé.

De même, la régulation économique du médicament pourrait bénéficier d’une comptabilisation des recettes fiscales et sociales générées par la production d’un médicament sur le territoire national et l’exportation. Enfin, la régulation économique du médicament doit bénéficier d’une gouvernance stratégique à même d’assurer la cohérence entre les différents objectifs de politiques publiques.

Table des matières :

Synthèse

Constat 1 : atout pour l’économie nationale, l’industrie pharmaceutique française perd du terrain par rapport à ses concurrentes allemande et italienne

Constat 2 : les modalités de régulation économique du médicament contraignent le développement industriel du secteur

Constat 3 : l’accès de la population aux médicaments est fragilisé par la stratégie de régulation par les prix

Proposition n°1 : provisionner le risque de rupture d’approvisionnement en médicaments

Proposition n° 2 : valoriser les contraintes sur la production liées à la transition écologique

Proposition n° 3 : capitaliser les bénéfices budgétaires anticipés des innovations médicamenteuses qui se manifesteront dans le système de santé et dans l’économie

Proposition n° 4 : valoriser le retour fiscal et social de la production industrielle de médicaments sur le territoire national

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