Espace adhrent
Page d'accueil > Rencontres et débats > Rexecode dans les médias > Agir sur les coûts, la concurrence et les prix pour des gains durables de pouvoir d'achat

Agir sur les coûts, la concurrence et les prix pour des gains durables de pouvoir d'achat

- Les Echos, décembre 2019

04/12/2019

L'écart de pouvoir d’achat entre la France et l'Allemagne tient en deux chiffres: les prix à la consommation français sont supérieurs de 5,7% aux prix allemands, alors que le revenu par habitant est inférieur d’environ 10% en France. L'écart de prix entre les deux pays s'explique notamment par les coûts salariaux, la fiscalité de production, ainsi que le niveau de concurrence sur les marchés de biens et de services. Agir sur ces trois leviers serait beaucoup plus efficace qu'un coup de pouce fiscal.

C’est l’un des rappels majeurs de l’ouvrage récent de Thomas Philippon, The Great Reversal: la concentration croissante du pouvoir économique entre quelques grandes firmes ne permet plus de faire des Etats-Unis l’incarnation d’une économie de marchés libres et ouverts.

L’Europe se rapproche bien plus de ce modèle: elle présente des niveaux de prix inférieurs sur nombre de services comparables (transport aérien, communications, accès à internet) et ses pratiques réglementaires ont évolué vers une ouverture accrue de ses marchés. Mais en son sein des écarts de prix de biens et services demeurent, notamment entre ses deux principales économies.

La comparaison effectuée par Eurostat du niveau de prix d’un panier de biens et services homogène montre ainsi que les prix à la consommation sont supérieurs de 5,7% en France aux prix pratiqués en Allemagne. Or le revenu par habitant est inférieur d’environ 10% en France. D'où un écart majeur de pouvoir d’achat entre les deux pays.

Une partie de l’explication de l'écart de niveaux de prix entre la France et l'Allemagne
se trouve dans les structures de coût relatif

• S’il a eu tendance à s'en rapprocher, le coût salarial horaire français demeure supérieur de 2% (ou 70 centimes par heure) au niveau observé en Allemagne dans les secteurs marchands. Pourtant, le salaire horaire moyen est inférieur en France de 3,3 euros, soit 11,5%, à son équivalent allemand. L’écart réside dans un niveau de charges annexes au salaire supérieur en France de 4 euros par heure, soit 51% de plus qu’en Allemagne.

• Un second élément de différenciation tient à la fiscalité de production. L’ensemble des taxes et prélèvements qui frappent les entreprises au cours de leur activité représente 9,1% de leur valeur ajoutée en France. Cette fiscalité se retrouve répercutée dans les prix à la consommation, ce qui nuit au pouvoir d’achat ; dans les prix à l’exportation, ce qui pèse sur leur compétitivité ; prélevée sur les marges, ce qui handicape le potentiel d’investissement voire menace la pérennité des entreprises.

• Une autre explication à l’écart franco-allemand de niveau de prix tient à la réglementation sur le marché des biens et services. Cette piste a récemment été explorée par France Stratégie qui note que, si "elle permet d’assurer la qualité des biens et services, de garantir la sécurité du consommateur et de veiller à la protection de l’environnement, une réglementation mal calibrée peut aussi créer des situations de rente pour les entreprises et contribuer à des prix plus élevés".

Or, d’après les indices calculés par l’OCDE, la France réglemente davantage les marchés de biens et services que ses partenaires européens. Une réduction par 2 de l’écart de l’indice de réglementation français à celui de ses partenaires de la zone euro contribuerait à relever la production potentielle de 1,3 point à long terme et à réduire sensiblement le taux de chômage et le niveau des prix.

La voie de l’assouplissement des réglementations comme facteur de libération de la croissance et du pouvoir d’achat avait été empruntée en 2016 par le Ministre de l’Economie E. Macron avec sa loi éponyme. C’est celle du soutien du pouvoir d’achat par la fiscalité qu’a choisie d’emprunter le Président Macron, une voie moins urticante pour des professions réglementées, à l’impact rapidement perceptible pour les ménages, mais aux effets moins durables sur l’efficacité productive et donc in fine le pouvoir d’achat.

Pouvoir d'achat: la France peut faire beaucoup mieux
Chronique de Denis Ferrand parue dans Les Echos du 3 décembre 2019

Actualités

Etudes pour le débat public