Focus
Perspectives économiques à court terme
Les indicateurs de trésorerie des PME/TPE du baromètre Rexecode/Bpi France poursuivent leur lent repli amorcé depuis deux ans. La faiblesse de la demande, actuelle ou anticipée, freine l'activité selon deux dirigeants sur trois, tandis que neuf sur dix redoutent les répercussions négatives de l'instabilité politique. Associé à des conditions de financement jugées un peu plus difficiles, ce manque de confiance bride les intentions d'investissement qui seraient au plus bas depuis la crise Covid.
Rexecode et Bpi France ont interrogé début octobre* les dirigeants de PME et de TPE sur la situation de trésorerie, leurs intensions d'investissement, et les principaux freins à la croissance de leur entreprise. A nouveau, un focus était consacré à l’impact de l’incertitude politique et budgétaire.
Au 4e trimestre 2025, 36% des dirigeants signalent une détérioration au cours des trois derniers mois. Qu’ils portent sur le passé récent, la situation actuelle ou les perspectives à 3 mois, tous les soldes d’opinion relatifs à la trésorerie se replient, prolongeant ainsi un mouvement lent amorcé depuis deux ans. Parallèlement, les conditions d’accès au crédit à court terme se tendent: 22% des PME et TPE déclarent avoir rencontré des difficultés pour financer leur trésorerie (contre 19% au trimestre précédent).
La faiblesse de la demande, actuelle ou anticipée, demeure de loin le principal frein à l’activité, à un plus haut depuis 2018, début de l’enquête: 66% des dirigeants la citent comme contrainte majeure (contre 61% fin août-début septembre). En revanche, les difficultés de recrutement se réduisent nettement, mentionnées par 33% des répondants contre 38% au trimestre précédent. Les tensions sur le marché du travail se relâchent ainsi clairement.
Seuls 39% des dirigeants prévoient d'investir cette année 2025 (contre 45% au trimestre précédent), soit le niveau le plus faible observé depuis la crise Covid. Le solde d’opinion sur les montants investis chute quant à lui à –29, bien en deçà de sa moyenne historique (–5). Ce pessimisme affiché dans l'enquête contraste néanmoins avec les indicateurs économiques, l’investissement des entreprises ayant progressé de +0,9% au 3ème trimestre 2025 en France, ce qui témoigne d’une résilience au climat d’incertitude.
92% des chefs d'entreprise redoutent un impact négatif du contexte politique sur leur activité, dont 62% estiment que cet impact serait de forte ampleur (57% au trimestre précédent).
Associée aux conditions d’accès au financement de l’investissement jugées un peu plus difficile ce trimestre et aux perspectives de demande plus dégradées, l’incertitude se traduit par un attentisme marqué sur les projets d'investissement. Près de la moitié des dirigeants concernés envisagent de reporter leurs investissements compte tenu de l’incertitude en matière de politique économique, quand seulement 29% comptent les maintenir (− 5 points ce trimestre). La proportion comptant les annuler est stable à 23%.
L’instabilité actuelle et la situation des finances publiques contribue par ailleurs à des tensions sur les taux souverains, conduisant à un écart moyen d’environ 80 points de base par rapport à l’Allemagne depuis la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024, contre 40 points en moyenne avant l’annonce. Les PME/TPE craignent que les tensions sur les taux de la dette française affectent leurs conditions de financement. Plus du quart des dirigeants anticipent qu'il leur sera plus difficile d'obtenir des financements, et 31% que le coût des crédits sera plus élevé en raison de la hausse des taux souverains. Pour autant, l’évolution des conditions de financement est un motif très mineur de report ou d’annulation des investissements.
Des leviers existent néanmoins pour rehausser le moral des dirigeants. Plus des deux tiers des dirigeants estiment qu’une meilleure visibilité sur les comptes publics est indispensable pour restaurer la confiance et près de la moitié (47%) le retour de la confiance des ménages comme condition essentielle à la reprise. Si le contexte international apparaît secondaire face aux enjeux domestiques, plus d’un tiers des dirigeants jugent que la détente des tensions géopolitiques et commerciales serait un facteur déterminant. Enfin, 28% pointent le besoin d’une stabilité réglementaire accrue pour redonner de la visibilité et encourager l’investissement.
Néanmoins, 34% des dirigeants de PME/TPE estiment que leur activité se porte mieux que ne le laisse penser le contexte politique et médiatique, tandis que 40% considèrent que ce climat est cohérent avec ce qu’ils perçoivent à l’échelle de leur entreprise. Cette situation "réelle" semble un peu plus balancée que les craintes liées à l’incertitude exprimées dans les résultats précédents.
* Les réponses apportées par les chefs d’entreprise au questionnaire transmis par Bpifrance et Rexecode ont été collectées entre le 13 et le 24 octobre 2025 ; plus de 1100 réponses ont été recueillies.