Les exportations françaises seraient pénalisées par un déficit de compétitivité "hors-prix et coût" (Banque de France)

Quel bilan de la compétitivité prix et coût dans les exportations de la France depuis le début des années 2000 ? - Banque de France, 24 juin 2021

28/06/2021

Avant la crise sanitaire, la performance de la France à l’exportation s’était stabilisée après une décennie de dégradation amorcée au début des années 2000. Mais, selon une étude de la Banque de France. les gains de compétitivité permis par la baisse du coût du travail n'ont pas entièrement compensé les pertes liées à la dégradation de la compétitivité "hors coût et prix" relativement aux autres grands pays de la zone euro sur la dernière décennie.

La décennie 2000-2010 a été marquée par une dégradation de la compétitivité de la France vis-à-vis de ses partenaires européens. Selon une étude publiée dans un Bulletin de la Banque de France, la perte de compétitivité liée aux coûts de la main d’œuvre a été effacée vis à vis de l'Allemagne mais la "performance" macroéconomique des exportations françaises n'a été que stabilisée (mesurée par le ratio exportations sur la demande adressée à la France).

En 2019, la France tendait à regagner des parts de marché mais la crise du Covid-19 a fortement affecté les exportations en 2020, surtout selon les auteurs en raison du poids de l'aéronautique, secteur qui avec le tourisme était un atout depuis le milieu des années 2000.

La note BdF présente une estimation économétrique des différents facteurs de la dynamique à l’exportation de la France entre 1999 et 2019, vis-à-vis de l’Allemagne, de l’Italie et de l’Espagne. Ces facteurs sont la structure géographique des exportations, les prix et coûts, et un facteur résiduel "hors prix et hors coût".

• Les effets de demande liés à la spécialisation géographique ont eu un rôle modéré (les principaux partenaires commerciaux de la France se situant en zone euro) : neutre ou légèrement négatif sur la performance vis-à-vis de l’Allemagne ou de l’Italie, légèrement positif vis-à-vis de l’Espagne.

• La stabilisation de la performance à l’exportation de la France de 2016 à 2019 s’explique en grande partie par une amélioration notable de la compétitivité coût.

- La compétitivité coût de la France s'améliore depuis 2008, grâce à une baisse cumulée d’environ 14% du coût unitaire du travail relatif France‑Allemagne. A la veille de la crise sanitaire, la France avait ainsi "intégralement comblé sa perte de compétitivité coût" enregistrée par rapport à l’Allemagne depuis 2000. On notera toutefois que la France a perdu en compétitivité coût vis-à-vis de l’Espagne de 2008 à 2017.

- Au total, les performances à l’export de la France vis-à-vis de l’Allemagne, de l’Italie et de l’Espagne se sont améliorées, surtout dans la période 2016-2019, en grande partie grâce à une amélioration notable de la compétitivité coût, et dans une moindre mesure grâce à la compétitivité prix (les deux étant difficiles à distinguer dans les estimations présentées, prévient la Banque de France).

• La compétitivité "hors prix" et "hors coût" continue de pénaliser les exportations françaises sur 2016-2019, mais moins qu’en 2000-2007.

- Ce facteur "affecterait structurellement nos exportations" vis-à-vis de l’Allemagne, de même que vis à vis de l’Espagne et de l’Italie (hors période 2007-2016). Il peut d'abord refléter un problème de tissu industriel avec la dégradation de l’offre potentielle produite en France (mesurée par le PIB potentiel). Le "résidu" non expliqué par le modèle économétrique peut avoir des causes multiples (choix des grands groupes dans l’organisation de leur production, qualité des produits, contenu technologique, etc.). L'exemple allemand montre aussi que compétitivité "hors coût" et "coût" peuvent être liées: la modération salariale négociée a permis de préserver l'emploi "dans des sites ayant recours à une robotisation porteuse de gains de productivité".

- L’amélioration des marges n’aurait donc pas encore eu d'effet sur la compétitivité "hors coût" des exportations françaises selon les auteurs qui avancent plusieurs hypothèses. D’abord, les marges retrouvées investies dans la R&D ne produisent leur effet sur la compétitivité "hors prix et coût" qu’à l’horizon de plusieurs années. Ensuite, ces marges ont pu permettre de "maintenir l’activité sur le territoire national grâce à une profitabilité accrue, mais sans pour autant favoriser de nouveaux investissements susceptibles de soutenir l’exportation".